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Confiné, le MAB France n’a pas pu écrire son édito, le Covid19 - SARS-CoV-2 s’en est chargé.

 

Bonjour (enfin si je puis dire… en ces circonstances),

Nouveau virus encore inconnu il y a quelques mois, je suis aujourd’hui dans toutes vos conversations, je bouscule vos vies et sème la tristesse. Le moins que l’on puisse dire, c’est que je prends ma place dans la biosphère : je colonise mes hôtes, vous, êtres humains notamment, j’utilise votre métabolisme pour me répliquer et vos comportements pour me transporter et me disséminer. Si largement que cela fait de moi une vedette !

La vitesse de ma dispersion est à l’image du fonctionnement des humains au XXIème siècle : une multitude de déplacements et d’échanges rapides et planétaires. Ce sont ces déplacements et ces échanges qui me permettent de me disperser si vite et partout. Mon impact est massif et violent, et sûrement encore à venir, surtout parmi les plus vulnérables des humains et les plus pauvres. Je ne sais pas encore si je vais m’arrêter, et quand ? Si je vais revenir, et où ? Et probablement que d’autres que moi prendront le relais…

Bien sûr, je ne peux rien à cette progression, c’est à vous de m’arrêter ou de vous adapter. Mais une chose est sûre : cette crise pourrait vous faire réfléchir profondément sur la situation du monde que vous avez construit, sur vos attitudes individuelles et collectives, sur ce que vous voulez transmettre à vos enfants et aux générations futures, sur vos relations avec la nature et les autres êtres vivants de cette planète. Bien entendu il va falloir revoir la manière dont vous vous protégez et reconsidérer vos systèmes sanitaires… mais vous pourriez aussi voir plus loin.

Certains prédisaient mon arrivée. De nombreuses alertes avaient déjà été émises (par des écologues, des épidémiologistes, des économistes et des agronomes) sur les dangers de l’uniformisation et de la simplification des écosystèmes, sur les modèles économiques qui cherchent toujours le profit pour certains êtres humains au détriment du bien-être de la majorité, sur les conséquences des modifications des écosystèmes à grande échelle ou des bouleversements du climat, de l’élevages intensifs et du commerce incontrôlé d’espèces sauvages. Mais rien ne semblait pouvoir infléchir vos trajectoires de folies. En quelques semaines, j’ai réussi à remettre en cause cette belle mécanique.

Le coup d’arrêt que vous vous êtes imposés montre que vous êtes capables de réagir rapidement et massivement. Alors pourquoi était-il impossible hier de réagir aussi efficacement face aux menaces plus sourdes mais plus profondes et lourdes de conséquences du changement climatique ou de la perte de biodiversité.

Vous observez que cette crise offre à des animaux et des plantes quelques nouveaux espaces de liberté, que votre air est plus respirable… un premier signe ? D’autres modes de vie seraient donc possibles, qui permettraient au plus grand nombre de mieux résister à ce type de prolifération massive et planétaire, et d’en atténuer les conséquences. La pandémie que j’ai causée provoquera-t-elle la rupture permettant aux humains de réagir enfin et de s’engager dans des voies altérant moins la planète et moins dangereuses pour leur avenir ? Fera-t-elle ressortir ses belles qualités que sont la solidarité, la créativité, la détermination et l’empathie ?

Les hommes et les femmes devraient tirer des leçons de cette catastrophe et en faire une opportunité afin de mieux considérer la place de chacun dans la société et de bâtir un modèle plus solidaire et résilient ; de repenser la mondialisation et changer leurs habitudes de consommation, enfin décarbonées et économes en ressources naturelles renouvelables ; de laisser une place plus grande et respectueuse aux autres êtres vivants pour vivre en harmonie. Qu'ils restent mobilisés et qu’ils s'inspirent de ce qu'ils savent déjà faire en ce sens.

Avril - 2020